22/01/2012

Sunday morning à la sauce 21ème siècle ; parce que l'histoire se répète.

Sans m'appesantir sur l'herbe qui n'est pas verte, je marche tremblant pour que le jour se lève. Au loin les arbres bougent comme portés par une musique folle et sans rythme. La tête dans les nuages semble répéter mon reflet dans le miroir teinté de buée. Je sors dans le salle de bain propre mais différent à chaque fois, comme si les couches de crasse que j'enlève font de moi un homme plus grand. Une dame est morte dans mon quartier, et je pense à cette lettre sans destinataire que j'ai écrit, il y a un moment déjà, lorsque la vieille d'à côté été morte.
C'est un dimanche sans doute plus que normal. Le repas gargantuesque du midi, les pieds nus sur le sol froid et mes parents pour me dire de mettre des chaussettes. L'envie de partir, être chez moi ailleurs qu'ici mais le plaisir aussi que l'on me répète sans cesse les mêmes choses. Cloué à mon lit à trainer, attendre que le temps passe : "tu rêves" ? non, je crée.

Il faudrait sans doute que je m'occupe autrement, pour le moment, je regarde le ciel être bleu, je regarde la maison en face de ma fenêtre sans rien n'y distinguer. Je devine au loin la mer ondoyante sous ce mistral timide. Cela en fait, des jours où je ne me suis pas rendu ivre, mais c'est peut-être bien aussi, l'idée que je me stabilise. Je n'écoute plus les morceaux tristes dont j'avais l'habitude de m'abreuver. Je préfère laisser ça à d'autres, à des gens bien plus fort que moi.

21/01/2012

Interlude (bis)

Real hero, clope et toi qui traine dans ta chambre un peu trop petite. J'ai les pieds nus, l'impression d'avoir marché des kilomètres alors que finalement, on a beaucoup fait de surplace. Et je blottis les songes, enrubannés, dans ce lit minuscule. Je souris.


Alors qu'il est nuit et que je suis étalé morne sur mon lit, je repense à toutes les raisons qui font que je trouve ta peau douce et je laisse la vie être une mélodie. Il est déjà 23h lorsque je songe à bailler, et je pense à mes jeans, troués, dans lesquels je t'apparais. Je souffle parce que je suis râleur et ce soir je dois avoué que j'aurais aimé dormir contre toi. Ce sera pour demain, voilà tout.

16/01/2012

"Nous sommes tous comme des maisons aux fenêtres fermées sur nos petites émotions."




Des vessies pour des lanternes et du ciment pour les caravanes : c'est tout ce qui restait disséminé et dispersé au milieu de ma caverne ou ne résidait plus que la tempête. Mon crâne battait une symphonie sans rythme alors qu'au final, il ne restait que des feux d'artifices sur des bateaux de croisière pour être comblé. Et alors que je respirais ému de vivre tout de même, je laissais mon regard porter au loin sur les flots maquillés de soleil où seule la paix berce les oreilles. Grimé d'amer je laissé la bière reposée sur le zinc où j'étais accoudé, le temps de comprendre que les pétarades dehors, ce n'était pas la guerre.
Alors que je criais fort puisqu'il n'y avait personne, il m'a semblé que ta silhouette m'a tiré de là ; mes pieds commençaient à s'enfoncer dans ce sable mouvant. Les eaux salées ne portent pas la trace du drame puisque tout se dilue, même l'orgeat dans le pastis. Au déjeuner il n'y avait que des plats terribles mais je m'y suis fait ; trouvant la force de vivre une journée sans y penser. Des vessies pour des lanternes et les lueurs qui vont avec : "on fait avec" que l'on murmure dans la grotte mal lunée qu'est notre société. Alors que le vent souffle je lève ma main leste à ta santé et je sens mon cœur y battre comme un tambour. Il faudrait fuir mais courir j'ai oublié. Je suis un gars de la grande ville moi j'ai pas de poumons pour respirer le grand air, j'ai juste une peau qui résiste aux pluies acides. Et lorsque j'entends la soufflerie de mon ordinateur portable je sais que je ne m'enfuie pas - que le ciment n'a pas besoin d'être coulé pour que j'honore mon rôle : cette année, pourtant bohemiens, nous ne partirons pas en voyage.

12/01/2012

Et on dansait comme des sauvages.

Il ne reste plus qu'à crier dans cette tempête qui ne souffle pas, qui reste en travers de la gorge comme une lame acide qui m'égorge. La musique tambourine et il faudra attendre demain 18h pour respirer, respirer enfin. Je n'ai pas vu de flaques d'eaux pourtant la vie est trouble, et j'écoute des freestyles géniaux depuis que je suis rentré chez moi, pour me sentir à l'ancienne, pour redécouvrir une jeunesse heureuse faite de rap qui claque à n'importe quelle heure : jour nuit ; étrange panorama. Et dehors seul les chiens aboient, il n'y a pas de caravane ni de gypsies dans le passage, juste des guitares qui se lamentent et un piano désaccordé. On a oublié de faire une grande fête, d'être heureux et ivre. On est juste coincé ici, entre deux eaux, deux quais mais trois gares alors que la voix est enraillée, et qu'il ne reste qu'un album blanc à passer. Sur le manège les gamins s'égaillent, et je suis citoyen d'une citée sans rêve, sans horizons. Je souris tout de même, même si ça fait mal au bide, il faut savoir forcer la chance, tenter la joie. Remplir son ventre de liquide, tremper sans cesse cette peau sèche, et sentir la vie à nouveau qui court partout ; loin de la musique aigre du carrousel. Je souris, je montre mes dents de loup, je ne mort que le vide pour le moment.


Je prends une grande respiration, apnée jusqu'à demain : 18h.

11/01/2012

Il s'agit de parler de soi, sans ne rien dire.

Au premier regard, je me suis vu édenté et peut-être j'ai imaginé qu'il fallait que j'arrête de rêver, que j'arrête d'avoir la tête en l'air pour capter les étoiles. Dans mes yeux, il y avait que le regard fatigué de la nuit courte, des nuits courtes que j'enfile nouvellement soucieux, j'écoutais Rachel & Cali de Damien Jurado comme là maintenant.
Dans la précipitation ce matin, j'ai oublié de dire que finalement, je n'étais pas malheureux, juste à l'arrêt. Il faisait un froid très sec dehors, et je dois dire que les mines inquiètes ne m'ont pas fait battre le coeur. C'était quand même bien, de se retrouver tous, d'avoir l'impression de revivre normalement. Alors bien sûr j'ai composé et je suis sorti de l'amphi F en disant que je savais pas ce que j'avais fait, enfin, que ça valait peut-être rien. Et bien sûr tout le monde m'a dit d'arrêter mon cinéma. Et c'était bien ça. Comme l'impression que tout recommence.
Je me suis rendu compte à quel point il est atroce de dire "c'est la vie" lorsque l'on parle de la mort. Je me suis rendu compte que la vie est forte aujourd'hui, lorsque tu as sauté dans mes bras, en sortant juste après moi de la salle d'examen. On avait pourtant passer la nuit l'un contre l'autre. C'était doux, intense comme une musique que l'on se répète pour se donner du courage. J'ai décidé d'être courageux, comme si 2012 était l'année pour cela. 2012, je l'espère juste moins pourrie que 2011, ce sera bien déjà. Et c'est pour ça que je l'épelle, que j'en parle qu'avec détachement.
Et puis, peut-être une année venteuse, pour le moment, je garde mes poings un peu moins fermés, j'essaie les pointillés histoire de rendre un peu de vie à l'image figée que j'ai donné de moi-même ces jours-ci. Je souffle sur mes mains, pour quelles soient chaudes sur ta joue. Et te dire que je trouve tes yeux très beau, et que ton sourire à la douceur de ces nuits de juin qui ont des airs de matin de printemps.

10/01/2012

Interlude.

Soleil sans rien d'autre par la fenêtre. La chambre est exiguë, mais c'est bien, c'est bien. Ca apaise le cerveau les chambres repliées sur elle-même, ça dilate le bon temps. Je souffle l'air de rien la fumée de ma cigarette, je devrais l'allumer pour avoir l'impression de fumer. Tu veux me lire Sade avec un sourire pervers, histoire de voir. Tu pars, tu reviens et il y a du vent dans le couloir alors que tu me dis "Adieu" en attente de retour.
Moi, les pieds nus, je sifflote et écoute cette musique qui rend si mal sur de si petites enceintes. je me laisse bercer par la fatigue, les émotions de la matinée. Il paraît qu'il faut que j'arrête d'être triste alors je me réfugie, là, dans ce bout du monde de 9 mètres carrés, à peine. Totalement délabré, de la moisissure au plafond et l'impression qu'il pleut tout le temps sur cette vitre. On se sent bien là où il y a ton odeur, alors je m sens bien ici, qu'importe la largeur des murs, de toute façon y a que nous qui faisons du bruit ici.

07/01/2012

Sinon moi, ça va.

Il pourra y avoir toutes les orchestrations du monde mais rien dans mon coeur ne remplacera l'aigreur d'un coucher de soleil d'hiver. Traînant la patte, les pieds en terre comme toutes ces plantes qui flétrissent lorsque la maison est abandonnée je ne m'abreuve de rien. Je me brûle la rétine avec complaisance, regardant le soleil tomber, déchu. Au royaume des ombres, je me sens mis à mort, et tout ce que je dis représente une chaîne impossible à briser autour de mes doigts. Emprisonné de mes rêves, je regarde le monde d'un oeil usé et vitreux. Je repense à toutes ces paroles finales que l'on a l'outrecuidance d'articuler avec fierté. Et toutes les vexations qui s'en suivent ne sont qu'un peu de Bitter dans la limonade qui n'avait pas besoin de tant pour être dégueulasse.
Sur l'étendage, j'ai accroché mes pensées percées, les mots que je n'ose me dire mais qu'il faudra que j'apprenne à regarder en face. Et ma mère semble commencer à penser que je suis en âge de comprendre. Et bien sûr je comprends, depuis qu'il y a eu la douleur ; et depuis, surtout, que j'ai passé une heure à pleurer devant la porte de l'immeuble de R. alors qu'il pleuvait ventait et que j'étais pieds nus en t-shirt à ne pas chercher à me plaindre, à juste être porté par la rage. Je me suis éduqué tout seul, et de travers : je n'ai jamais voulu vraiment écouter ma mère, elle avait souvent raison, pourtant. L'esprit aiguisé par cette remarque plus qu'inutile, je me retrouve affamé à bien vouloir manger quelque chose tant le coeur est omnivore. J'écoute des musiques tristes pour me rassurer sur le fait que dans la vie il y a toujours pire ; et bien sûr que je pense à la vie sous terre, que je pense à la froideur d'un corps qui a su être chaud, pourtant. A la douceur de la peau vieillie, et aux rictus que l'on trouve chez ces personnes nouvellement apaisées d'être décédées. Mais ça fait mal pour les vivants. Ca fait mal de voir qu'ici rien ne s'améliore, bien au contraire.
Je reste donc chez moi, et sur l'étendage il y a toutes ces lettres que j'aurais aimé écrire, tous ces mots que l'on voudrait toujours dire dans un moment de bravoure (et de gloire aussi sans doute). Et quand je compulse tous les regrets et les remords des au revoir, j'ai envie de crier à l'injustice. Je relis tous ces mots comme des constellations perdues et éloignées, et je sais qu'il faut les dire au vivant, parce que plus tard, ce sera inutile. Je relis tous ces mots entre eux, parce que dans mon corps ils sont éparpillés, parce qu'une fois dit, ils s'éparpillent ; ils s'envolent.
Alors très vite, il est l'heure de la fin des rires. Très vite, il est l'heure de sourire comme si de rien n'était, et de bien vouloir croire qu'en effet, la vie, c'est la mort des êtres chers. Et que devenir adulte, c'est apprendre ça, à faire avec. Avec tous ces mots que l'on a pas dit par pudeur et qui nous restent sur les bras comme des poids terribles qui nous coulent lorsque on cherche à faire surface.

Les cowboys sont ivres, alors il faut trouver quelqu'un pour jouer de la guitare.




On parlait de courses de voitures dans des citées sans âmes. On parlait de l'intérêt d'être humain, alors qu'au fond, seul, la langue pendante, on s'aliène chaque soir lorsque la télé est allumée. On parlait du désintérêt aussi, de la bouche pâteuse lorsque l’on danse et lorsque l’on se ressert des plats de pâtes gigantesques pour remplir nos corps (et nos cœurs) de vide. C’était une époque folle tu sais ? On était des galopins aux jeans usés, aux chaussures de toile trouées et le blouson de cuir en guise d’apostrophe, de doigt donneur tonitruant. On avait soif à force de poncer toutes ces bières. Et on attendait les jours de pluie pour pouvoir pleurer tranquille.
Par terre, la pluie est une fine pellicule, et lorsque le moteur gronde, je me réveille en sursaut, sueur et tout ce qu'il faut. Et des images d'ailleurs s'écrêtent au plafond. C'est la douce ivresse, explicite, des rêveries dont on est tiré par l’angoisse. La sueur est froide sur mon front, ça dégouline et tâche les coussins. Et c’est toujours la même musique, qui me guide pas à pas. Mes semelles raclent parce que je ne soulève pas les pieds, quand j’ouvre les yeux, mes pupilles se dilatent, j’ai le cœur qui bat un hymne. En piste, la course est assoiffante. Moi je me sens revivre au conditionnel quand la clef tourne dans le contact. Le contexte, j’en ai rien à foutre. Tout dépend de la carrosserie, le moteur, ses jantes bien golées, ses airbags... enfin, faut taper dans le lubrique quand la strip-teaseuse en est encore au dégrafage de soutien-gorge : minuit deux. Quand les pièces tombent sur le comptoir, ça fait une bruit assourdissant : pour boire. On cherche tous des réponses dans les nuits d’insomnies, c’est comme si on lisait les lignes. Il n’y a que des murs, gris. Les rêves n’ont pas de titres, paraît-il.

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Dans un teddy rouge et blanc qui sent le vécu, ou ne serait-ce que le voyage outre-frontière, tu cruise la nuit, lunettes noires alors que tu n'y vois rien. Wayfarer comme une perspective, une ligne de conduite à déborder. Surtout déborder. Le moteur crache, tu craches, tu crois. Les watts pètent et le son à fond, « on fond sur les glaces qui reflètent notre ennui nocturne ». Des poches sous les yeux tu écrases la clope de façon frénétique alors que les night shops te font même payer les sachets plastiques maintenant. En pilote automatique, tu te laisses guider par l’harmonie du volant, l’itinéraire peut se morfondre, tu bougeras la tête, nonchalant avec le sourire de travers. Cosmogonie de l’inertie, ou je m’abuse. T'as viré le sigle Mercedes du milieu du capot comme si c'était une effronterie, tu es piéton aux pieds usés quand l’heure du dernier métro est passée, expirée ; brûlée.
Le rythme te fracasse là, au niveau de la nuque. C'est un coup du lapin permanent, une raison toujours plausible de vivre à nouveau. Cloué sur place, tu avances, petits pas par petits pas vers la plénitude. Les regards langoureux n’expriment que le désarroi, tu as enfilé l’armure de guerrier ; les doutes sont fracassés contre ces murs d’enceintes gigantesques / The wall (another brick in ~) – again.
Et dans la classe grasse (des dinners) de ces clubs débauchés tu marches conquérant jusqu'au dancefloor. Le rythme est lent, filtré, tu es imparable jusqu'au refrain. Puis submergé par les émotions, tu perds pieds. L’envie de pleurer, et tes collègues autour pour te sentir homme. Ce soir il y aura peut-être du sang sur le dancefloor. Les lames filent vites, il faut dire lorsque dehors la pluie gronde. La nuit des longs couteaux qui brillent tels les sourires canines, tels les sépultures et tous ces monuments au mort que sont les paquets de clopes vides : it’s toasted.
Il y a de la sciure parterre, et ça tombe bien tu veux gerber ta semaine. Il manque tout de même les crachoirs. Tu t'en fous, tu danses et tout le monde fait une ronde autour de toi. Clin d'œil et stroboscope, monde parallèle. Qu'est-ce que devenir un homme ? Avoir 17 ans, rouler des pelles à une fille contre la pierre froide de cette cave alors que les enceintes sonnent la fin de soirée, le malaise de 3h du mat : celui où l'on peut mourir, on s'en foutra pas mal. On te tape sur l’épaule, virevolte, il faut que tu t’enfuies, c’est l’heure. Dehors, les molosses laissent passer le cabaret des tourmentés, ton teddy pèse une tonne sur tes épaules. T’es une gravure de mode indémodable, t’es une gravure, une griffure, un pied de nez à cette nuit sans lune – loup, garou. Tu grattes deux conneries à grailler, du saignant, du steak et de la barbaque. Le kebab passe mal mais tant pis, ce sera ça ou rien. Puis, tu retournes dans la fosse au lion, l’air de rien, toi qui n’a peur que du sommeil et des matins frémissants.
Et toutes les petites morts qui s'en suivent ressurgissent comme des raisons de naitre à nouveau. Ici et là, on s’entrechoque, et toi impassible tu triomphes. La sueur au coin des yeux, comme l’embrasure de portes qui sont des ténèbres, des rodéos. Sur ta monture tu as écrit Agile Beast et elle a l’air chaude la brune. Ca tangue puisque l’immobilité c’est le silence, et le silence, c’est la mort. Et lors de l'ultime verre gratté au comptoir, frappé sur le zinc, on essuie la bave au coin des canines – nous sommes une meute – on essuie le parquet, on se frotte aux enceintes dans des mouvements inanimaux, ça fait tellement d'heures que la musique tourne en boucle qu’il ne reste que la persistance d’un sentiment profond : celui de la joie. Persiste le rêve qui nous porte rayonnant. Hypnotisé par les cachets d'ecsta au bord d’une extase gouffreteuse – les joints et le cul de la blonde en face comme une bonne excuse à repentir à la messe du lendemain, tes mouvements sont saccadés même dehors, même à l'air frais. Tu pues la cigarette, l'air dégouté, tu es vivant, pourtant. Et c'est dans cette crasse jouissive que tu es le plus vivant des adolescents. Puisque maintenant plus rien ne compte, seule ta gerbe sur les pieds du videur. Il te fait un clin d'œil rance ; l'habitude. Le coup de poing surgit de nulle part tant les bastons se télescopent, frôlent l’inattendu comme des heures d’attentes sur un quai de gare. Le bruit de verre brisé te laisse la larme à l’œil. Et le gang se rebelle, l’esclandre est totale, t’as peluché la salope de l’autre, là-bas. Tu souris, sarcastique alors que tu ne tiens pas debout, et tangue ta raison de vivre : une arcade sourcilière sourcilleuse. Tu glisses dans la souricière, au chaud : autant fuir quand la raison n’est plus.
De loup, tu redeviens le branleur de tes jours maladifs. Les trous dans les poches, t'as claqué tes derniers deniers pour quelques bières de plus ; et c'était de la pisse. Tu rentres à pied alors que le soleil se lève vaguement amer, vaguement dégoûté. Et le bateau ivre fait un boucan d’enfer en sortant du port. L’appel du large, comme une oraison funèbre ; l’appel du large comme une porte de sortie infime, nécessaire. « Pour naître de ma mère j'ai pas attendu l'autre, moi je suis ma propre poutre je me soutiens seul rien à foutre » : tu répètes ça mais tu es aphone à cause du whisky siphonné le cul au sec. C'est ton orgueil qui te traine jusqu'à ton lit où tu t'étales habillé, puant, magnifique.
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Pied au plancher je fuis ma vie comme une parcelle étrange, panoramique, orbitale d’une fresque navrante, monochrome. Une image, une boucle lumineuse de musique terrestre. Je ne vois rien avec ces lunettes et roule au creux de mes épaules le poids de la journée – t’étais belle dans ta robe du soir : Oh, hauts talons et moi tout enguenillé. Dimanche c’est demain, et je bois, boîte comme un moteur rouille. J’ai failli frapper la glissière. Je me relève, héroïque et la clope est tordue au coin de ma bouche alors que les chevaux galopent là, quelque part. On oubliera les héros, moi je persiste, des cernes rouge sang dans le rétroviseur central. Il faudrait des guitares, des lentes paroles au creux de mon oreille. Mais il y a juste mes mouvements engourdis par la fatigue. Conducteur chevronné, je pilote je crois, les yeux bandés pour éviter de regarder en arrière ce qui me reste à vivre. J’ai enfilé mon armure à nouveau, oui, j’étais magnifique mais aujourd’hui le soleil se lève.

06/01/2012

L'euphorie des sages.




Fracassé sur des rimes sans rivages. Au loin, il y a le battement de tempes de la ville nerveuse, dans ma caverne, je ferme les yeux ne voulant surtout pas vivre la journée. Je claque des doigts je crois pour créer une rythme / un hymne : c'est minuit qui sonne entre mes deux oreilles, au milieu du cerveau. Je passe à autre chose. La gorge crasse, je souffle et il n'y a que la buée qui s'en sort, je pense au jour où l'on regardera tous les couchers de soleil à la même heure. Le jour où 17h ne sera pas une mise à mort abrupte, stupide. Je pense à l'été, à l'hiver qu'il faudra vivre coûte que coûte avant tout ça ; comme une bataille perdue d'avance mais au goût si doux de réglisse et de sirop d'érable. J'écoute la nuit être trompeuse. Les loups qui ne sont pas de sortie, la ville être affolante. J'écoute comme un corps qui se déchaîne le marron de tes yeux me chanter des choses douces à attendre.
Je me sens résonner dans cette boîte. Je me sens vivre, frissonner et à la lueur des stroboscopes, il me semble apercevoir mon destin. Et si l'on se perd à vivre des soirées Kitsch, sans fin, tant mieux. Se retrouver ne sera que plus excitant. On se fera l'amour comme on se parle, avec des éclats de voix parfois. Puis en douceur lorsqu'il s'agira de reprendre son souffle ; lorsque les reins auront dit tout ce qu'ils ont sur le coeur.
Je marche, je racle les pieds au milieu d'une pente désastreuse. C'est dur à avaler, d'être riche d'émotion, et se réveiller toujours dans le même lit chaque matin. Comme une musique de fin sans fin.
Je pense à toi qui s'en va et revient enfin. Et je souris parce que je suis heureux de voir que l'horizon est moins goudronneux lorsque le temps passe. Que du béton on s'en sortira peut-être : à la nage ou à la rame, ça n'a que peu d'importance. Je relirai tes vers et toi mes lignes, et de nos rides on aura rien à dire : je rêverai toujours de cités interdites, de villes fantômes et de New York au coeur de l'automne.
Mais je veux bien que tu me contes tout un tas d'histoires sales, pour abreuver mon coeur d'homme le temps d'une danse. Dehors il n'y a que le vent dans mes paumes vides, et il semble dire que tu es la bienvenue.

"You're talking about you boy. But you're still the same." ///

Et je marche dans ces rues sans noms, chez moi.

J'écoute From the woods !!! avec l'idée claire que plus rien n'a d'importance. Je fais traîner mes pieds pour abîmer les semelles, pour trouver une raison nouvelle d'acheter des chaussures. Son sourire me dit que je suis pathétique à essayer de me débattre, à faire jaillir la vie de nulle part. Je parle à une personne inconnue, à la troisième personne, à la tierce, à la quarte ; aux plans dans lesquels je ne me retrouve pas. Puisque mon enfance est morte le 30 janvier 2011 à 21h10, autant avancer avec le vent de face. Ce mistral que je connais bien maintenant. Je parle en faisant une voix forte pour faire croire que je suis bien dans mes chaussures de toile. J'ai une amoureuse au joli sourire. Et c'est un réconfort suffisant. Ne reste qu'à dire ce qu'il y a là, au fond du coeur ; là où tout est cloisonné. Et je finirai bien, par assommer des montagnes.